"Wario Ware inc. : minigame mania" sort au printemps sans tambours ni trompettes. On a déjà pratiqué le perso dans quelques jeux de plates-formes assez tordus, conçus avec détermination pour être l'exact opposé de l'expérience Super Mario Bros. Wario est lourd, grossier et brutal et ne parcourt le monde que dans le but de s'enrichir, difficile d'apprécier le bonhomme si l'on goûte peu l'humour absurde et un peu pipi-caca.
Trop récent, trop bizarre... Un nouveau Wario ne peut décemment pas provoquer autant d'excitation qu'un épisode estampillé Mario, Samus ou Link. La mention sur la boîte attire quand même un peu l'attention : on nous promet plus d'une centaine de mini-jeux. Difficile de croire qu'une cartouche GBA peut contenir autant de choses et puis surtout, combien d'entre-eux seront réellement intéressants ? On a rien compris -comment le pourrions-nous ? On a jamais joué à un truc pareil.

La cartouche est enclenchée, la machine allumée et l'intro, sommaire, nous révèle le nouveau plan magique de Wario pour s'enrichir : vendre des tonnes de jeux vidéo codés n'importe comment (sans le savoir, il vient d'inventer Steam). C'est alors qu'un écran apparaît avec un ordre : Arrête !
Hein ? Quoi ?? Arrêter quoi ?? Il y a une espèce de part de pizza avec la tête de Wario qui tourne et, oh, la mèche d'une petite bombe brûle très très vite sous l'écran d'action, ça explose et on a perdu une vie, et ça enchaîne illico sur un nouvel ordre. Saute ! Ce coup-ci on comprend qu'il faut agir, on prend une seconde pour analyser ce qui se passe, une seconde pour prendre les commandes (la croix de direction et un bouton, ça va, on a vu plus complexe) et une dernière seconde pour agir. Wario bondit comme une gazelle en surpoids au dessus d'une pomme de terre à roulettes (oui, vous avez bien lu). Victoire !! Mais on a pas le temps de jouer de la mandoline alors qu'une nouvelle épreuve s'enchaîne immédiatement.


Appuie ! Bouge ! Evite ! Tire ! Renifle ! Lance ! On a l'impression de se faire gueuler dessus comme dans Full Metal Jacket. La pensée même de protester devant ce torrent de stress n'arrive même pas à éclore tellement on est, justement, stressé par ce rythme infernal. Une scène surréaliste efface l'autre, on ne digère l'humour d'une situation qu'une seconde après qu'elle soit passée : fermer la porte au nez d'un représentant de commerce, compter les aliens, renifler la chandelle de morve d'un beau mec, passer la brosse à dents, faire un tope-la à un gentil chien, un shoot'em up avec une bouteille de ketchup, se mettre un doigt dans le nez, un casse-briques avec des vrais gens, Mario Ultraman vs Bowser Kaiju...

Les mini-jeux arrivent de manière aléatoires mais sont organisés par thèmes, chacun faisant partie d'un niveau narrant l'histoire d'un comparse de Wario. Après la petite dizaine d'épreuves spéciales estampillées W, on a droit à des épreuves (plus ou moins) sportives accompagnant les tribulations de Jimmy T., étoile des dancefloors disco, puis on rencontre Mona, jolie serveuse en retard qui nique les limitations de vitesse et les voitures de flics avec le singe planqué dans sa vespa (...), Dribble et Spitz (jeux SF), chien et chat chauffeurs de taxi, le Docteur Crygor spécialisé en jeux avec des graphismes digitalisés, dont la missions principale semble être de passer du temps aux toilettes, j'en passe et des meilleur(e)s pour me concentrer sur le jeune 9-Volt. Ce dernier mérite presque un article à lui tout seul car ses épreuves sont basées sur le best of de l'histoire de Nintendo : Super Mario Bros, the Legend of Zelda, Metroid, F-Zero, on hallucine de voir autant de chefs d'oeuvres condensés en pépites de 5 secondes, mais également de voir convoqués les produits méconnus du japonais : aspirateur robot, voiture radiocommandée ou pince téléscopique.


Wario Ware n'est pas seulement la plus grosse compil du monde, c'est tout autant une épreuve de concentration qu'un jeu de rythme qui se colle à vous et s'accélère sans pitié encore et encore. 4 vies, pas une de plus, les game-over arrivent très très vite mais on recommence immédiatement sans fatiguer afin de tout subir et d'enfin débloquer tous les mini-jeux. L'étonnement fait place à l'émerveillement puis à un subtil abrutissement face à la cadence et à une ambiance musicale étrange, tour à tour bourrine-rigolote ou techno-distordue. Vous avez probablement lu ce poncif des centaines de fois mais je ne vois pas comment définir les choses autrement : on a l'impression d'avoir pris de la drogue.

Mais attendez, c'est pas fini : en plus des mini-jeux il y a d'autres mini-jeux un peu plus longs qui font offices de boss toutes les 15 épreuves, et encore d'autres mini-jeux autonomes qui se débloquent au fur et à mesure, des fois que vous n'en avez pas encore assez. Et si vous voulez tout débloquer, il faut faire un high score sur toutes les activités (et là je vous dis juste : bon courage)

Wario Ware est à sortie un olni (objet ludique non identifié) total, une nouvelle manière d'appréhender le jeu vidéo et surtout, un robinet à rigolade quasiment intarissable. Le bouche à oreille finit par faire effet, le concept est un succès qui est porté quasi tel quel sur Gamecube en multiplayer puis toutes les consoles à Mario dont il devient le kit de démonstration absolu : toutes les fonctionnalités de la Nintendo DS sont exploitées day one par Wario Ware touched, des myriades de manières marrantes de tenir sa wiimote sont inventées sur WW Smooth Moves et même la Wii U a droit à son jeu perso, franchement super malgré une poignée seulement d'activités disponibles. Enfin, mention spéciale à l'épisode 3DS qui est une compil du meilleur de la série, avec enfin en Europe les mini-jeux à l'accéléromètre de WW Twisted, jamais sorti chez nous. A l'heure où je vous écris ça, la Switch attend sa déclinaison qui sera axée sur la coopération.
Aujourd'hui la sortie d'un nouvel épisode de Wario Ware est un événement attendu par des millions de fans et... euh non, j'exagère. La licence est solide et appréciée mais on ne verra pas de files d'attente devant les magasins le jour de sortie du nouvel opus. Mais ne vous y trompez pas : vous n'y passerez peut-être pas 100 heures comme le dernier Zelda mais dans 10 ou 15 ans quand vous retrouverez la vieille console, qu'est-ce que vous mettrez pour faire une partie ou deux en ricanant bêtement ? (cette histoire est tirée de faits réels).