Ici, on n'a pas affaire a un FPS ni a un shmup. Pas question de tirer sur tout ce qui bouge. Ce jeu d’aventure, d’exploration et de réflexion vous proposera au contraire de résoudre des énigmes, d'activer des mécanismes, de rechercher des objets ou de survivre à des courses-poursuite en voiture. Pour cela, on pourra contrôler tour à tour quatre personnages et un chien.

Il y a tout d'abord Emile, simple fermier français mobilisé malgrès son âge déjà avancé. Vient ensuite son beau fils Karl, un allemand. Bien que marié à une française dont il a eu un enfant, celui-ci se vois expulsé vers son pays d'origine et enrolé de force. L'américain Freddie quant à lui est engagé dans la légion étrangère, et cherche à se venger d'un régiment allemand en particulier, tandis que la belge Anna, infirmière, arpente le front pour soigner les blessés tout en recherchant son père. Le doberman walt enfin, aidera tour à tour les autres protagonistes tout au long du conflit.

 

 

Les destins de nos différents héros vont ainsi s'entrecroiser tout au long de ces quatre années d'horreur. Amitiés virils et amours sincéres, tragédies, sacrifices, humours parfois... tel sera leur lot quotidien dans leur quête commune pour préserver ce qui fait d'eux des humains face à l'enfer de la grande guerre. Et ca marche : imédiatement, on se prend de sympathie pour ces combattants ordinaires. on s'inquiète pour eux, on vibre avec eux. l'identification  fonctionne à plein régime. et c'était exactement le but recherché : On ne le répètera jamais assez, Soldats Inconnus n'est pas un jeu de guerre mais un jeu sur la guerre, sur les blessures invisibles et indélébiles qu'elle laisse dans le coeur de ceux qui la vivent ou qui y survivent. A travers l'histoires simples et poignante de ces anonymes, c'est la mémoire de la grande histoire qui nous est transmise.

 

 

En effet, si le scénario en lui-même est de pure fiction, le contexte historique par contre est restitué d’une façon rarement égalée dans un jeu vidéo. Il faut dire que l’équipe de développement a reçus le concours de l’historien Alexandre Lafon et de la mission du centenaire (créer pour commémorer les cent ans de la grande guerre). La lecture de nombreuses lettres de soldats écrites entre 1914 et 1918 a également permis aux créateurs de se replonger dans l’ambiance de ces années de guerre. cet effort ce sent non seulement dans la narration, mais aussi dans l'ambiance si particuliére du jeu. Rarement on aura  ressenti autant d'empathie pour des personnages videoludiques et leur compagnon à quatre pattes.

         

 

La direction musicale et les effets sonores ne sont pas pas en reste : la douce melodie mélancolique de l'écran titre par exemple restera longtemps dans nos têtes. Sans oublier les musiques populaire des passages en taxi, aux accents comique presque incongrus dans un jeu sur la guerre, mais qui accompagnent si bien l'action. Le perfectionnisme a même poussé l’équipe d’Ubisoft à se rendre à Verdun et dans les tranchées du front ouest afin d’y enregistrer certains bruitages et effets sonores (bruit d’un barbelé découpé ou de la chute d’une grenade). Les producteurs de la série documentaire Apocalypse : la première guerre mondiale ont eux aussi prêté mains fortes en procurant des bandes sons d’époque.

 

 

En outre, il est possible de collecter tout au long du jeu jusqu’à cinquante-cinq objets représentatifs du conflit (comme un masque à gaz, un périscope de tranchée ou des plaques d’identités militaires de différentes armées). La récupération de chacun d’entre eux fera apparaitre une fiche informative décrivant son histoire et son utilité. Ses fiches sont accompagnées de photos d’époques colorisées issues là encore du documentaire Apocalypse. Le comédien Marc Cassot, dont c'est l'un des derniers rôles, prête sa voix aux narrateur. Il intervient à intervales réguliers pour rappeler le contexte historique et narrer les aventures et les déboires de nos héros. Le devoir de mêmoire, objectif revendiqué ici, ne pouvait être mieux assuré. 

 

 

Dans le but d'être compris par tous, les dialogues entre les personnages sont représentés par des bulles de BD contenant des pictogrames, le tout soutenu au niveau sonore par un mélange de charabia et de mots d'argots. Le style visuel, conçus par Paul Tumelaire, s'inspire grandement de la bande dessinée. L'usage du tragi-comique est ainsi facilité, et le tout reste accessible à chaque générations. Bien sûr certains critiquerons certainement ces choix de game design, mais ils apportent incontestablement une douceur bienvenue dans un univers de violence et de mort. Le moteur graphique UbiArt Framework, utilisé à la perfection, fait ici honneur à sa devise "donner vie à l'art".

 

 

Enfin, les créateurs n'ont pas cachés s'être inspirés de titres tel que Machinarium ou Limbo pour la mise au point du côté jeu de réfléxion. Là encore, on ne pourra que saluer leur réussite : elle est évidente. D'ailleurs, ce n’est pas pour rien que Soldats inconnus : mémoires de la grande guerre à reçus en 2014 les prix de la meilleure narration et du meilleur jeu innovant lord de la cérémonie des Games Awards. Une suite (Soldats inconnus : frères d’armes), est disponible en exclusivité depuis début février 2023 sur l'application mobile de Netflix, avec qui elle a été produite en partenariat.